Lors de mes premières années d’école secondaire dans le Nébraska en 1984, j’écrivis un essai en classe d’anglais, dans lequel je décrivais la vie du camp de réfugiés de Buton, ainsi que l’inoubliable évasion en bateau vers Singapour avec Gary Ferguson. Écrivant de mémoire, je racontai succinctement l’évasion de Buton à Singapour qui prit place en 1979. Tout cela à cause de Gary Ferguson, vétéran du Vietnam et humanitaire de l’Arizona.

Après un peu plus de quatre années aux États-Unis, je continuais à lutter pour apprendre cette nouvelle langue, comme le prouve les nombreuses fautes de grammaire et d’orthographe de cet extrait de mon journal, à la date du 18 janvier 1984.

Ci-dessous, extrait de mon journal, illustré par les photos de Vincent Leduc :

 

 

École secondaire de Grand Island

(Grand Island, Nebraska, USA)

Anglais 5R. Période 10-11, M. Hammers

Nam Nguyen – 18 jan. 1984

 

Journal

 

ÉCHAPPÉ DE CHEZ MOI

 

C’est vraiment une chose stupide à penser. Pas de ma propre famille, mais d’une famille avec laquelle je suis resté pendant 8 mois à attendre dans un camp de réfugié.

 

​Ma cabane (à gauche) à Button Refugee Camp, mai 1979.

 

Eh bien, nous attendions que le gouvernement d’Indonésie appelle notre nom pour quitter le camp et aller dans le monde libre. C’était plutôt ennuyeux.

 

 

​Enfin un voyageur américain du nom de Gary F. est venu en visite dans notre camp. Il fut bientôt en amour avec notre peuple et nos activités dans le camp. Il était aussi préoccupé par les conditions de vie qui étaient très mauvaises.

 

 

​Une nuit, un bateau de boat people arriva comme d’habitude et tout le monde fut heureux de les accueillir. Mais une nouvelle loi  de l’Indonésie finalement proclama que plus aucun boat people ne serait autorisé à débarquer en Indonésie. Sur le bateau ils étaient tous tristes et inquiets. Ils n’avaient qu’une nuit et un jour avant d’être obligés de retourner en mer.

 

 

​Gary essayait de parler avec le gouvernement de l’île mais cela ne servit à rien de tout. Alors il eut une idée de commander le bateau et prendre tous ceux qui veulent aller à Singapour.

 

 

​Tout le monde dans le camp prenait la décision s’il fallait croire Gary et aller à Singapour avec lui. D’autres personnes ne veulent pas retourner en mer parce que ça leur rappelait beaucoup de souvenirs dangereux.

 

 

​Cette nuit je prends finalement ma décision d’aller avec Gary. Je savais que ma famille n’irait pas et ils ne veulent pas que j’aille avec Gary non plus.

Mais j’avais perdu l’esprit à ce moment là. Alors je me suis enfui sur le bateau cette nuit. La plupart de mon ami reste dans le camp.

 

 

​Nous sommes allé sur ce bateau pour presque cette nuit et le jour suivant nous étions très prêt des ports de Singapour. Beaucoup de grands navires étaient autour de nous, certains sortent pour nous faire signe, d’autres regardaient et des bateaux ne nous montraient même pas s’il y avait quelqu’un à leur bord. Nous pensions que peut-être ils avaient peur de notre bateau. Un bateau très étrange.

 

 

​Un avion est venu tourner très près autour de nous et plus tard un navire de la marine arrive et nous dit que nous ne sommes pas bienvenus à Singapour.

 

 

​Alors leur bateau nous remorque en haute mer. Ce fut un moment terrifiant, notre bateau se retourne presque et veut presque se briser en morceaux.

 

 

​Nous, cette nuit là, ne savions pas quoi faire, où aller. Finalement, l’idée embarrassante arrive, c’est de retourner au camp. Ce fut le moment le plus stupide et le plus embarrassant de toute ma vie.

 

NOTE DU PROFESSEUR : Je pense qu’il serait formidable pour vous de tout raconter dans un carnet de notes, ainsi vos descendants auront un récit de cette partie importante de votre histoire familiale.